J'ai du mal à me rappeler. Juste, t'avais flashé sur mon cul et t'as fais le chien pour récupérer mon numéro auprès d'une amie commune qui, dingue de toi, avait fait la connerie monumentale de nous présenter. Que tu m'as mythonné sur
The Rocky Horror Picture Show pour me pécho et que tu te faisais chier à La Sirène avec ta mère. J'me rappelle pas de notre première baise alors que c'est toi qu'as décapsulé, salopard. Par contre, j'me souviens de mes conneries de tes crises de jalousie des miennes des tirages de gueule qui me faisaient déjà péter des câbles et toutes les merdes pour lesquelles on s'est quittés comme des crétins. J'aime pas y penser. J'me rappelle pas de toutes les fois où on s'est croisés, sourit gauchement sans trop savoir par quel bout se prendre, on se haïssait comme on voulait se revoir. J'sais plus pourquoi on s'est recontacté mais j'me rappelle de Kebabia et de ma statue sur le sable blanc et gras de cette île à la con, du dégivrage de mon frigo -fais gaffe connasse, tu vas te couper, et vlan j'ai plus de doigt. J'sais plus pourquoi j'm'étais prise la tête avec ma grand-mère, mais j'me rappelle que tu m'as attendue une plombe en bas de chez elle dans ta twingo vert pistache. On a été dans j'sais plus quel bar de la plage, il faisait encore bon, j'étais en débardeur et j'ai hésité à me barrer avec la bouteille collector de Despé parce que je suis une meuf. Dans ta caisse, on a parlé de cul, t'étais fou parce que j'avalais, j'étais morte de rire pour ton ex et ton plan cul. On a parlé de serial killers, Bundy et Kamper et De Salvo et c'était badant. Tu m'as ramenée à 6h30 chez moi, le soleil se levait et j'avais les boules, j'étais si bien dans ta caisse à regarder tes yeux et surtout ton sourire, le plus beau du monde, à faire trembler mes lèvres et mes cuisses. J'ai eu du mal à dormir, j'voulais pas le tromper, mais t'étais déjà revenu dans ma peau, comme une cicatrice qui parfois encore démange, un membre fantôme, un souffle sur ma brûlure à la cuisse. Tu t'en rappelles, de celle-là? Ton putain de scooter jaune dégueulasse et mes résilles. Elle a fini par disparaître. Dommage, je l'aimais bien, elle était chouette. On s'est revus le lendemain, le surlendemain et après encore. Ah oui, ça me revient, la Fête de la Scie et ma mère. Il pleuvait, j'avais froid dans mon corset, t'avais ton perfecto et tu frimais, sans pour autant ouvrir ta gueule quand je déversais amèrement ce qui me pliait l'échine. Il aurait été dingue, de savoir que je te crachais tout, alors que j'lui disais rien. Presque tous les après-midi, j'te rejoignais. On allait à la plage, sur le parking ou les galets, ou on restait dans ta caisse. La fête de la musique avec l'autre meuf dar qu'on a réussi à faire boire, on a regardé mon oncle chanter, et t'as aimé. C'que j'étais fière de mon sang. On a eu la dalle, on est rentrés chez toi, plâtrée de pâtes devant la saison 4 de Breaking Bad. Tu t'es endormi sur ma cuisse et j'me suis bouffée les doigts de te réveiller pour me ramener. Et la fête du bac, sa race la fête du bac. T'as bu, moi aussi, mais moins. Trouduc d'Alexis qui chialait pour sa trouduc de meuf, et l'Ukrainien qui me parlait, et t'hallucinais. Moi aussi mais j'avais bu, alors bon. L'Ukrainien qu'hésitait à vider son estomac par terre pendant que toi tu m'attirais à l'arrière, dans tes bras, et je tremblais comme une feuille, j'avais besoin de changer de culotte à peine tu me foutais ton écouteur mal fichu dans l'oreille.
Fringue par fringue. Et vas-y que j'te caresse, que j't'embrasse, et je voulais me fondre contre ta peau, malgré l'autre con qui dégueulait, malgré le froid, et ma tête qui commençait aussi un peu à tourner. L'était 7h quand on est rentrés chez toi. Tu m'as proposé un massage et j'ai failli chialer de rire, tellement tu prenais de gants pour me désaper. Bah ta grosse gueule meuf, ta grosse gueule, parce qu'effectivement tu m'as juste massée. Un des moments les plus érotiques de toute ma vie, et là j'ai l'impression d'être cette connasse de Rose dans cette bousasse de Cameron, paint me like one your french women. Le bout de tes doigts qu'effleurait mes seins et le bas de mon dos, et je faisais le dos rond comme une chatte en priant pour que tu me baises ou juste me serres dans tes bras. T'as choisi la deuxième option. Dis, tu te rappelles comment il était fou, comment j'ai pleuré le lendemain en me réveillant dans tes bras? Moi oui. Combien je voulais le quitter, enfin. Aujourd'hui encore, je sais pas si t'étais un prétexte ou si c'est vraiment pour toi qu'on s'est déchirés pour de bon. J'regrette rien, si ce n'est l'avoir mythonné. Enfin, vu ce qu'il est devenu. J'me rappelle de
Black Swan dans ton plume et du teasing qui s'arrêtait jamais,
à quoi on joue, là?, j'sais pas mec mais là tu me refroidis. Et puis
Lord of War et les galoches, les pelles, les salades de langue. J'me rappelle, quand on s'est embrassés pour la première fois, t'hallucinais que je te laisse me peloter les seins. J'sais plus quand j'ai commencé à dormir dans ta bagnole, serrée contre toi. J'sais plus quand tu m'as mis ta main entre tes cuisses et fais mourir un peu à l'arrière de cette foutue twingo. J'me rappelle de la Japan Expo et de ta trouille, de tes textos tout le temps. De la boule au ventre à l'idée de te revoir et de bouffer cette bouche, ce sourire, ces yeux. Te bouffer tout entier et me lécher les doigts. T'as du mettre moins d'un quart d'heure à débarquer, j't'avais pris des photos des costumes d'Alexandre Astier. Les pelles qui n'en finissait plus, tes mains qui me faisaient mal, ta caisse toujours trop petite. On s'est planqués dans un coin à Sainte-Adresse. On a baisé comme des ados et dans ma tête j'avais 15 ans, ta bite, ma chatte, toi, moi, le fou rire. On s'est vus tous les jours, tous les soirs j'ai dormi chez toi. Je galérais à dormir, tu me tenais trop chaud, et tu ronflais comme un porc. On s'est mis en ménage. J'aime dire que j'avais pas le choix, mais je mens, le choix je l'avais, mais j'te voulais. Une heure de route ça m'a déjà niqué un couple. J'm'en veux pas d'avoir fait ça, mais d'avoir un peu quand même trahi mon père. Et au final c'était pas parfait, ça le sera jamais, mais ça marche. Notre appart' tout miteux avec du moisi au mur et les tuyaux qui chauffaient trop, les gens qui regardaient par la fenêtre. Aujourd'hui, on est les bourges de Mont-Saint-Aignan, dans notre immeuble de vieux qui nous zieutent de traviole. J'me rappelle qu'au Havre, on allait tout le temps au Samouraï. Aujourd'hui, on sort plus de trop, pas assez de thunes, trop crevés. Mais toujours, on s'aime. Sans la plage, sans les nuits dans la caisse, sans tourner autour du pot, sans se caresser dans le sens du poil. T'es bourré de fissures, sur la gueule et dans l'âme, je suis mal recollée, la colle déborde de partout et les vapeurs me rendent nauséeuse. On sera jamais lisses. On se fout les doigts dans les plaies en hurlant tellement ça fait du bien. C'est cette merde, ton sourire et mes gueulantes, nos ongles rongés, nos puteries et tout ce qu'on brise en riant, qui font que nous, ça marche.
La St-Valentin, ça me rend conne et hormonale. J'me donne du diabète.